Michel Rocard, dans les années 2000, expliquait, « l’indépendance, vous l’avez déjà ». C’est vrai, presque toutes les compétences ont été transférées à la Calédonie. Le congrès et le gouvernement collégial de la Nouvelle-Calédonie sont à majorité indépendantistes. Le chef du gouvernement et le président du Congrès sont des Kanaks indépendantistes.
Le vote pour l’indépendance se serait traduit par le simple transfert des compétences régaliennes dont la plus importante dans la vie quotidienne est celle du maintien de l’ordre.
Même si, actuellement, l’état a beaucoup de difficultés à rétablir l’ordre, la population calédonienne sait que cela serait bien pire si l’état français et ses forces de l’ordre étaient absentes.
Je note d’ailleurs que le gouvernement indépendantiste ne réclame pas que la charge du maintien de l’ordre lui soit transféré en cette période trouble. Les indépendantistes pensent ils que s’ils obtiennent l’indépendance maintenant l’état Français va leur prêter ses gendarmes ?
Après cette digression, j’en reviens au titre de l’article qui aurait pu être « La haine ».
Quand je suis arrivé à Nouméa en 1999, j’ai été frappé par la richesse des Caldoches. Cela se voit au premier coup d’œil et si on creuse un peu plus on s’aperçoit que ceux que l’on avait cru aisés sont véritablement très riches. C’est généralement proportionnel à l’ancienneté de la famille sur le territoire. Plus l’ancêtre fondateur est arrivé tôt, plus ses descendants sont riches. Cette règle a beaucoup d’exceptions, mais reste la règle de base.
La ville est très belle avec des équipements bien meilleurs que ceux de la plupart des villes françaises. Je peux comparer la plage de l’Anse-Vata et de la baie des citrons avec les plages de Marseille ou de Cassis. C’est le jour et la nuit au niveau des équipements comme les toilettes, les douches, les tables pour s’asseoir, les bancs, les pelouses, les pavements, les arbres. Il y a évidemment aussi la place pour chaque occupant, la chaleur de l’eau et ce que l’on voit sous l’eau, mais ces derniers éléments ne sont pas dus à l’homme.
Même si Nouméa manque d’unité architecturale, il y a beaucoup de villas luxueuses et de belles résidences avec des vues magnifiques. A coté de cela, il y a des non-européens, principalement Kanaks qui n’ont pas grand-chose, ni instruction, ni qualification, ni emploi. Beaucoup sont venus à Nouméa ou dans sa banlieue en quittant leurs tribus dans le Nord pour se retrouver dans des squats, sortes de bidonvilles. C’est un phénomène fréquent dans le tiers monde, mais relativement récent en Nouvelle-Calédonie. Beaucoup avaient rêvé de l’indépendance.
Une fois, j’ai croisé des jeunes kanaks, prés la baie Maa, ils m’ont dit en montrant le paysage « En 2018, tout sera à nous ».
Les émeutiers sont des jeunes qui veulent détruire le pays parce qu’ils ont compris qu’ils n’auraient jamais le niveau de vie qu’ils rêvent. Ils passent leur vie à boire, à fumer du cannabis. Ils volent des voitures parce que c’est leur seul moyen d’en avoir. Il n’y a pas de RSA et aucun avenir pour eux. Ils préfèrent voir s’effondrer le pays que de laisser tranquille les blancs de Nouméa. Ils se sont attaqués aux quartiers les plus pauvres parce que c’est principalement là ou ils vivent, mais leur but ultime, ce sont les quartiers Sud. Pour eux, l’indépendance, c’est chasser les blancs de leurs villas pour les occuper à leur place.
L’animosité envers les blancs mais aussi envers toutes les autres ethnies a beaucoup augmenté depuis que je suis arrivé à Nouméa en 1999. « La Calédonie sauvage » est la bible des randonnées en Nouvelle-Calédonie. « Le contour des grosses gouttes » est un itinéraire qui permet de découvrir la vallée de la Thy à partir de la tribu de Saint Louis. Il faut garer sa voiture à coté de la tribu de Saint Louis. Je l’ai fait seul en 2000. J’ai retrouvé ma voiture intacte. Un an ou deux plus tard, sur la route du Mont Dore, j’ai pris en stop un Kanak que j’ai déposé à la tribu de Saint-Louis. Je lui ai demandé si c’était possible de me garer à nouveau à cet endroit. Il m’a dit que non et d’attendre. Depuis, ce serait du suicide de refaire ce que j’ai fait en 2000. Cette route est un cauchemar quotidien pour les habitants du Mont-Dore qui sont nombreux à travailler à Nouméa. Les caillassages sont fréquents, les tirs partants de la tribu aussi. Il y eu plusieurs morts. Les blocages de la route sont monnaie courante. Quand les gendarmes osent rentrer dans la tribu pour rechercher un délinquant, ils viennent en force et se font tout de même tirer dessus.
Ça c’était le quotidien des habitants du Mont-Dore, ces dernières années. Depuis le 13 mai, le Mont-Dore et tout le Sud de la Nouvelle-Calédonie ne peuvent être joints que par bateau.
Dans quelques jours, les fours de la SLN vont s’arrêter parce que le minerai nécessaire pour alimenter les fours ne peut pas être acheminé. Des fours qui s’arrêtent ne peuvent pas repartir. 2000 personnes supplémentaires perdront définitivement leur travail, toutes ethnies confondues.
Difficile de savoir si le calme reviendra temporairement, mais il est impensable que l’économie redémarre et que la confiance revienne. La haine a d'ores et déjà triomphé.
Les blancs ne songent qu’à fuir, mais ce n’est pas facile quand on est propriétaire de son logement et que l'on n'a que cela comme patrimoine, que l'on a perdu son emploi ou qu'on a une très petite retraite. Tout le monde pense que la France n’arrêtera pas les émeutiers et qu'elle sera forcée de se retirer. Tout le monde espère qu'elle essayera de protéger les citoyens français. Comment ? Personne n'en sait rien.
Christian Bernardi
Rectificatif du lendemain : Cette phrase " Tout le monde pense que la France n’arrêtera pas les émeutiers et qu'elle sera forcée de se retirer. " est trop pessimiste. On peut espérer que les commanditaires des émeutiers seront arrêtés et que le calme reviendra.
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